Charles Roulin fixe ses sujets comme un instantané photographique. Ainsi, pour chaque pièce commandée, c'est une aventure longue et délicate qui commence. L'originalité tient aussi dans sa capacité à produire des scènes différentes, enchâssées dans des matériaux les plus modernes, ou les plus nobles pour les manches en ivoire de mammouth, ou les plus anciens taillés en os de dinosaure pétrifié, en bois de rose ou de palmier. Pour certaines réalisations, il fait appel, pour ses lames en damas, aux meilleurs forgerons. Aucune pièce n'est soudée, ni rapportée, et tout est intégralement sculpté dans la masse. Selon la taille de l'objet, le nombre et la nature des animaux représentés, et surtout de la complexité de la scène, la confection d'un couteau en 3D peut demander plusieurs semaines de travail.Charles Roulin commence par dessiner la forme générale de sa future création directement sur le métal (le même pour l'ensemble du couteau, hors manche). Après l'avoir scié pour en séparer les différentes parties, il fraise et poli pour en révéler et en sublimer les détails. Même procédé pour la partie du manche non métallique. Suit alors l'étape de la sculpture ajourée. "S'il s'agit d'une commande, je peux dessiner un projet. Mais la plupart du temps, le motif change en cours de route, en fonction de l'inspiration", avoue-t-il. Les scènes les plus demandées sont les batailles de cerf et d'ours, les chasses à court et les portraits d'animaux de compagnie. Pour la question du réalisme, pas de souci. Ses sculptures, il les réalise au binoculaire, sous des lumières à fibre optique,avec l'aide de fraises tungstène, plus dures que l'acier normal, "semblables à celles utilisées par le prothésiste dentaire mais en plus solide". Les plus fines ne mesurent que deux dixièmes de millimètres d'épaisseur. Car certains éléments de la sculpture ne dépassent pas le millième. Un jour, pour honorer une commande spéciale, il a même créé trois couteaux entièrement sculptés et ajourés mesurant 2,5 cm de long une fois fermés. Ils comportaient chacun une dizaine d'animaux. Or, même dans ces conditions, le fait que les deux parties du manche laissent apparaître la lame au centre, autorise des scènes à plans multiples dont l'effet de profondeur est stupéfiant.